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J’ai eu le plaisir de lire ce roman suite à une proposition de Masse critique privilégiée de Babelio. J’ai accepté parce qu’il traite d’un sujet qui m’intéresse et parce qu’il raconte l’histoire une jeune adolescente de quatorze ans, Ginny Moon.

Je ne suis pas très adepte de citer la quatrième de couverture, je mets plutôt en avant mon ressenti personnel. De plus, dans ce cas précis, je trouve que cette quatrième de couverture ne sert pas très bien ce récit très émouvant. Il faut avouer que, je n’aurais pas su la formuler car ça doit être un exercice très difficile de réduire ce livre à quelques lignes sans en dévoiler trop sur l’histoire de cette jeune ado autiste.

Car oui, de l’intrigue il y en a. Ginny Moon aura eu bien du mal à se faire enfin comprendre, elle doit retrouver sa Poupée.

Cette histoire commence alors que Ginny Moon a été adoptée par sa «  famille pour toujours » c’est ainsi que sa psychologue lui a demandé de nommer la maison bleue où elle vit désormais. Le couple qui l’a recueillie après avoir cru longtemps ne pas pouvoir concevoir d’enfants ont finalement une petite fille. Afin d’habituer Ginny à sa venue prochaine ils lui ont offert une poupée qui pleure et réclame à boire et des câlins. La maman va devenir quasiment folle lorsque la poupée étant dérêglée, Ginny ne sachant plus que faire, l’enferme dans une valise. Ce n’est que le début d’un long processus d’apprentissage, pour les parents-pour-toujours et pour Ginny.

L’auteur, Benjamin Ludwig a su intelligemment et avec force sensibilité nous placer au coeur des pensées confuses, agitées et paniquées de la petite Ginny. Sans doute parce que lui-même a adopté une enfant autiste.

La mère biologique de Ginny est une folle-dingue, qui a laissé son ex faire sa loi. Ginny n’était en sécurité que lorsque sa tante Cristal avec un C restait à ses côtés avec elle et sa poupée Kristal avec un K.

Ce fut une lecture troublante et bien triste. Ginny fait tout pour communiquer du mieux qu’elle le peut mais encore faudrait il que quelqu’un sache interpréter ses paroles. On ne peut pas poser plusieurs questions à la fois à Ginny. Elle se cache la bouche derrière ses mains lorsqu’elle veut absolument éviter de dévoiler un secret. Et de secrets il en est bien question ici.

Ginny Moon est une gamine épatante et obstinée, qui mérite tant de respect et d’admiration. Elle qui vit dans son monde intérieur avec des contraintes tout autour d’elle va mettre tout en œuvre pour tenter de s’enfuir, elle qui pourtant a trouvé un foyer aimant. Pourquoi vouloir à ce point s’enfuir pour rejoindre cette mère auprès de qui elle a manqué mourir ? A vous de suivre son aventure et de vous attacher à cette jeune ado. Elle le mérite grandement et celui-qui nous raconte son histoire utilise ce qu’il faut comme images et mots pour vous plonger dans ce que peuvent sentir ces personnes atteintes d’autisme.

Encore merci à Babelio et aux éditions HarperCollins.

Lorsque j’ai reçu cette proposition de lecture dans le cadre d’une masse critique privilégiée  je suis évidemment allée prendre connaissance de son sujet. Truman Capote est une personnalité qui m’intrigue depuis longtemps et je ne connaissais pas du tout ces fameux cygnes dont il est question dans ce roman. J’ai accepté tout en redoutant légèrement qu’il ne soit sujet que de potins ou de haute société, bref un côté glamour qui je l’avoue n’est pas trop ma tasse de thé.

Je vous le dis tout de suite, j’ai vraiment apprécié Les Cygnes de la Cinquième avenue de Mélanie Benjamin. Voilà, c’est dit. Maintenant je vais vous dire pourquoi

Son premier point est la qualité de son écriture, aisance et fluidité sont de beaux atouts pour que le lecteur entre pleinement dans le récit. D’emblée ce fut mon cas. Les phrases sont limpides, les personnages décrits avec beaucoup d’empathie ainsi que cette haute société des années 1950. Les flashs des photographes, les soirées mondaines tout est éclairé. C’est lors d’une de ces soirées que Truman Capote sera accepté dans le groupe de femmes nommées Les cygnes dont la plus renommée et respectée pour ses goûts est Babe Paley. Entre ces deux là va se nouer une amitié et dès lors Truman sera de toutes les soirées, introduit auprès de personnes les plus affluentes de l’époque, même les hommes ne le rejetteront plus dès lors qu’étant homosexuel il ne représente aucun péril entre eux et leurs épouses. Truman Capote écrivain est très extraverti, dans ce roman on l’imagine parfois comme un vrai gamin, sautillant partout, s’exclamant souvent devant tant de beauté, peut-être est-ce là le seul vrai bémol à mon enthousiasme, c’est parfois agaçant.

En fait le thème n’est pas passionnant en lui-même, on pourrait dire splendeur et décadence de l’amitié et la confiance. Il s’agit de trahison, celle d’un Truman Capote aux aboies après l’immense succès de De sang froid, le premier roman de non fiction.

Ce qui est troublant dans cette amitié forte développée entre Babe et lui c’est que j’ai cru que vraiment il ne pourrait pas lui faire le moindre affront, qu’il ne pouvait pas la blesser tant elle s’était dévoilée à lui dans son plus intime, elle la femme / épouse / icône de haute société. Des épouses vieillissantes qui font tout pour garder la tête haute, leurs longs cous de cygnes blancs maintenus fièrement. Babe derrière tout ce verni social, celle qui ne se dévoile même pas à son mari avant d’avoir passé de longs moments devant son miroir : le teint doit être impeccable, le maquillage discret et sans vulgarité, la taille fine, les vêtements du plus haut goût. Une vie bien triste malgré les achats, la mise en vitrine dans les plus grands restaurants pour que celui-ci s’assure sa renommée. Ne jamais faillir en sortant de n’importe quel endroit, toujours dignité, sourire afin d’être lumineuse sous n’importe quel flash photographique. Pas de vie intime pour ces cygnes y compris lorsqu’elles sont entre elles puisque on ne sait jamais ce qui pourrait en être déduit. Et c’est ici que Truman Capote fera le plus grand mal, les confidences faites, notre auteur en mal d’écriture va publier certaines choses privées bien évidemment en changeant les noms mais cela paraîtra dans le journal et ces femmes s’y reconnaissent y compris Babe, frappée à l’âme.

Peut-on en vouloir à un auteur de nourrir ses récits de ce qu’il entend et de ce à quoi il assiste ?

Comment a-t-il pu trahir sans même se rendre compte de la déception pour Babe ? Comment surtout n’a t-il pas compris leurs réactions ? Un enfant naïf pensant que tout est excusable.

J’avoue que grâce à ce nouvel éclairage je suis allée directement dans ma bibliothèque relire Prières exaucées.

Je remercie Babelio et les éditions Albin Michel pour ce beau roman qui je l’espère rencontrera son lectorat.

Sous silence - Catherine Enjolet Éditions Libretto 06-02-2014 / 6 € 70

Sous silence – Catherine Enjolet
Éditions Libretto
06-02-2014 / 6 € 70

Sous silence de Catherine Enjolet

Il s’agit là d’un petit roman car il ne comporte qu’une centaine de pages. Mais ce petit roman vous met un claque monumentale. Il est grand, majestueux, en un mot magnifique !

Catherine Enjolet donne ici la plume à Nabisouberne. Qui est cette enfant qui ne sait pas elle-même quel est son âge ? A travers ces quelques pages, l’auteur nous emmène à sa suite, nous invite à découvrir par touches adroites et touchantes le quotidien de cette enfant. Nabisouberne surnommée Bisou par certains, son beau-père entre autres, vit aux côtés de sa mère et sa grand-mère, s’occupant également de sa fratrie puisque sa mère est une personne constamment angoissée, vivant dans la crainte du regard d’autrui, la peur de la Ddass. Nous sentons dès le début de ce roman la puissance dévastatrice de cette peur :

– On va nous dénoncer !
Ma mère répète. À voix basse. Elle accélère le pas. Faut se méfier…Chut ! Je me tais. Je baisse la tête. C’est automatique. Je baisse les yeux dans la rue. Je fixe le caniveau, les gargouillis de l’eau. Je ne regarde pas pour ne pas qu’on me voie. Ma mère me tire par la main par petits coups secs comme si je ne disparaissais pas assez vite du paysage.
– On va encore nous dénoncer !

Sans le père, une mère aux abois qui crie «  au secours » et une porte qui se referme sur ses enfants, les séparant. Désemparés, l’affront gravé cette douleur laisse une empreinte indélébile. La famille vit chichement, tandis que la grand-mère continue de rêver au ancêtres. Et la petite Bisou fait ce qu’elle peut pour vivre dans tout cela, vivre est étant mutique au grand dam de l’école qui sait pertinemment qu’elle est intelligente. Seulement, qui pourra comprendre ce qui crie au fond d’elle ? Qui peut écarter de son chemin cette ombre menaçante qui la traque et l’accule au vide ?

Nabisouberne écrit sur des petits papiers, autant de papiers jetés au vent, autant de mots qu’elle extirpe naturellement de son petit être à l’étroit, et malmené. Et quand elle n’est pas mutique les prises de paroles semblent des affronts.

Bisou perdue sans identité, Bisou dans son quartier qu’elle aime aussi,la boulangerie et la petite trisomique, le café, les toits, la voisine qui chante ensoleillant l’immeuble.

Il est difficile de comprendre un enfant qui n’en est pas vraiment un, rude le chemin qui permettrait derrière cette soi-disant folie affichée de tendre une main. Pourtant, une personne va le faire, ce sera la Prof -de-comptoir.

Elle veille sur mes pages. Sur les Bisou comme moi. Les Fanny, les Lili, les Poussin et les autres.Ceux et celles qu’on ne sait pas entendre.

Ce n’est pas un livre qui se résume, c’est pour cela que j’ai choisi de ne pas copier la quatrième de couverture. C’est un roman qui se vit du fond du cœur et des tripes. Combien de ces enfants côtoyons-nous sans les entendre ? La note positive de ce livre c’est peut-être aussi nous dire « prenez le temps de les écouter, tous ».

L’auteur tout en narrant cette histoire d’une enfant dans un milieu qu’on qualifierait de bancal dépeint la vie d’un quartier au delà de celle difficile de cette famille. Je ne connaissais pas Catherine Enjolet et je suis vraiment ravie d’avoir pu la découvrir ici grâce à l’opération Masse Critique de Babelio et à la générosité des Éditions Libretto. C’est quasiment une certitude, je lirai à nouveau Catherine Enjolet.
À noter la très belle préface de Boris Cyrulnik.

Confusion des peines - Julien Blanc Editions Libretto Parution octobre 2013

Confusion des peines – Julien Blanc
Editions Libretto
Parution octobre 2013

Confusion des peines

Seule, la vie…, I

J’ai eu le plaisir de recevoir cette auto-biographie de Julien Blanc grâce à l’opération masse-critique organisée par Babelio  que je remercie sincèrement ainsi que l’éditeur Libretto.

Le mot de l’éditeur : « Que fut mon enfance ? Une suite d’erreurs. Erreurs de la part de ceux qui veulent les enfants comme ils les aiment, au lieu de les aimer comme ils sont. »

Orphelin recueilli par une marraine aussi bigote qu’austère, Julien Blanc sera rapidement envoyé à l’orphelinat puis en maisons de redressement à une époque où ceux qui ne filaient pas droit n’avaient que les coups ou la charité pour avenir. Il y apprendra la faim, l’humiliation et ne deviendra que révolte : une révolte qu’il partage ici sans artifice et qui n’altérera en rien ses rêves.

Mon avis :

De cette époque, je ne connais réellement que la Grande Guerre comme les contemporains l’appelaient. L’histoire de Julien Blanc débute à Paris en 1908, né orphelin de père, sa mère est son univers, son unique amour. Celle-ci se tourne vers les dames d’oeuvres pour survivre. L’une d’entre elle devient sa marraine, et persuade sa mère de le faire baptiser. C’est ainsi que sa maman devint bonne à tout faire. C’est elle qui lui apprit à lire, écrire, calculer et quelques notions de piano.

Aux huit ans de son fils, elle meurt et est enterrée en fosse commune. C’est alors le début de la valse entre les différents établissements pour le jeune enfant sans famille.

Il n’est pas difficile d’imaginer le désarroi du petit garçon qu’évoque Julien Blanc et encore moins de comprendre toute cette révolte montante en ce petit d’homme Là, où il lui fallait amour et tendresse, il n’eut que brimades, fessées, cachots, et humiliations.

Très vite il se dit :

Je commençais néanmoins de comprendre ce jour-là que la société est hypocrite, qu’il faudrait ruser avec elle, la prendre par surprise, à revers. J’étais tout d’une pièce. Quand j’avais quelque chose à dire, je le disais, ouvertement, brutalement, sans m’occuper des conséquences.

Au sortir de la maison de correction, il se lie d’amitié avec Jean, son aîné de 6 mois.

Julien Blanc trouve des mots forts et d’une beauté touchante au souvenir de cette amitié « ce bombardement de photons amicaux dans mes ténèbres. »

Il y eut les premières amours avec la déchirure des séparations et les trahisons.

Ce fut l’orphelinat puis les placements dans des familles. Des renvois parce qu’il vole en catimini. Ballotté d’un coin à un autre, sa marraine ne le suit que de loin, trop occupée par les hautes sphères et c’est Daise qui l’a en charge le plus souvent, Daise encore plus méchante que sa marraine.

A 14 ans il entre au patronage ( dépendant de l’Etat ) pour y apprendre un métier manuel, alors qu’il veut suivre des études pour aller au lycée tenter de rejoindre Jean. Il rêve toujours de devenir musicien.C’est à ce moment qu’il devient Pupille. La suite est dans la continuité, hélas pour lui, de ce qu’il a vécu et va s’aggravant.

Cette première partie des mémoires de Julien Blanc « Confusion de peines » nous révèle beaucoup de choses sur la vie dans les années précédent la Grande Guerre. C’est terrible de lire ce témoignage d’enfant puis de jeune homme, tellement brimé, aux rêves se heurtant à la réalité crue de la religion et de la bourgeoisie. Quelques mains lui seront tendues cependant et il gardera tout de même quelques espoirs dans sa tristesse environnante.

Les conditions dans lesquelles ont faisaient travailler ces jeunes enfants sont terribles et non sans rappeler ce qu’il se passe encore dans certaines régions du globe.

Ici, c’est tu plies ou tu vas au cachot. Sa parole est constamment remise en question, qu’il dise la vérité ou qu’il mente, le résultat face à ces nombreux adultes hypocrites et parfois pédophiles ne varie pas. Tout n’est quasiment toujours que rapport de force. 

Je finis ce retour de lecture par cette citation :

Etre libre ? Mais c’était impossible. Je n’aurais pu l’être qu’à mille lieues de toute civilisation. Ici, ma course à l’embauche me prouva, le jour que je me mis à y réfléchir de près, que je ne serais jamais libre. C’était un mot vide, dénué de sens.La liberté, c’est ce qui n’est pas défendu. Tout m’était interdit.

Je vous invite chaudement à découvrir La confusion des peines.