lhomme-chauve-sourisL’homme chauve-souris – Jo Nesbo

– « Est-ce que tu t’es déjà trouvé seul en l’air, Harry ? Tu as déjà volé ? Est-ce que tu as sauté de très, très haut, et senti l’air essayer de te porter, te recevoir et caresser ton corps ? »

Joseph avait déjà correctement entamé la première bouteille, et sa voix s’était enrichie d’un timbre chaud.

Le regard brûlant, il décrivit à Harry la beauté d’un saut en chute libre :

«  Ça réveille tous les sens. Tout ton corps te crie que tu ne peux pas voler. « Mais je n’ai pas d’ailes », te crie-t-il en essayant de couvrir le boucan de l’air qui siffle dans tes oreilles. Ton corps est persuadé qu’il va mourir et tire tous les signaux d’alarme – réveille complètement tous tes sens pour savoir si l’un d’entre eux arrive à trouver une issue. Ton cerveau devient l’ordinateur le plus puissant qui soit, il enregistre tout ; ta peau sent la température qui monte au fur et à mesure que tu tombes, tes oreilles sentent la pression qui augmente, et aucune ride ni aucune nuance chromatique ne t’échappe dans la carte que tu as sous toi. Tu peux même sentir la planète qui s’approche. Et si, à ce moment là, tu arrives à repousser la peur de la mort au second plan, Harry, tu es pour un instant un ange, à tes propres yeux. Tu vis une vie entière en quarante seconde.

– Et si tu n’arrives pas à repousser cette peur de la mort ?

– Il ne s’agit pas de la repousser complètement, juste de la mettre au second plan. Parce qu’elle doit être présente, comme un son clair et perçant, comme de l’eau froide contre la peau. Ce n’est pas la chute, mais la peur de mourir, qui réveille les sens. Elle apparaît d’un coup, comme un rush dans tes veines, au moment où tu quittes l’avion. Comme se piquer. Elle se mélange ensuite à ton sang, et te rend bien-heureux et fort. Si tu fermes les yeux, tu peux la voir comme un beau serpent venimeux qui te regarde de ses yeux reptiliens.

– Tu parles de ça comme si c’était une drogue, Joseph.

– Mais c’est une drogue ! Répondit Joseph qui gesticulait maintenant à qui-mieux-mieux. C’est exactement ça. Tu veux que la chute dure toujours, et quand tu auras sauté un certain nombre de fois, tu remarqueras qu’il t’est de plus en plus difficile de tirer sur la poignée d’ouverture du parachute.Tu finiras par avoir peur d’une overdose, un jour, et de ne pas tirer sur la poignée, et là, tu arrêtes de sauter. Et c’est là que tu te rends compte que tu es devenu dépendant. L’abstinence te déchire, la vie te semble dénuée de sens, triviale, et tu te retrouves à nouveau tassé derrière le pilote dans un vieux Cessna qui met des plombes à monter jusque dix mille pieds, ce qui ne l’empêche pas de te grignoter toutes tes économies. »

Roman traduit du norvégien par Élisabeth Tangen et Alexis Fouillet 

au commencementetaitlavie

Au commencement était la vie  Joyce Carol Oates

Cet avis de lecture a été rédigé par mon amie,  Marie Chevalier, auteur, dont vous trouverez le blog dans les liens amis. Merci à elle !

 

Deux gamines seules avec un père ivrogne et très violent.

Un jour, il les bat plus fort que d’habitude et la petite de 6 ans succombe.

Kathleen, 11 ans est « tabassée » et transportée à l’hôpital dans un état très grave.

Elle va s’en remettre mais à quel prix !

Toute sa vie sera marquée par cet évènement. Elle sera aide-soignante par choix. Et quand elle croit avoir retrouvé la paix et qu’elle tombe amoureuse d’un jeune médecin, elle envisage enfin une vie normale.

Elle ne se remettra pas d’un acte insensé et terrible qu’elle fera. Elle « aidera » les patients à trouver la paix.

Elle avait vécu le pire dans sa chair. Elle pouvait maintenant passer à l’acte.

Horrible histoire, bouleversante et tragique et folle de cette gamine missionnaire du malheur et de la mort.

Du grand Joyce Carol Oates comme d’habitude mais aussi comme souvent « âmes sensibles s’abstenir »

La quatrième de couverture :

Quatre SDF sont recrutés par le mystérieux Hensley pour devenir braqueurs professionnels. Après une préparation quasi militaire, tout est en place pour le coup d’essai : le braquage d’une banque en plein Paris. Mais rien ne se passe comme prévu…
Un scénario magistral pour un roman noir, tendre et énervé, qui met en vedette, une fois n’est pas coutume, les vrais oubliés de nos démocraties libérales.

Ce que j’en ai pensé :

Quatre sans-abris ( Paol, Louis, Sonia et Jack ) sont recrutés par Hensley (le metteur en scène ) pour braquer des banques. Ils vont subir un entrainement quasi-militaire dans un château. Lorsqu’enfin ils sont prêts, le braquage en plein Paris peut avoir lieu. Mais rien ne se passe comme prévu, il y aura des pertes humaines. Ils se sont fait berner. Au même moment un autre braquage a lieu qui lui,finira en boucherie.

Le commissaire Degrave se charge de l’enquête. Il est dans le même temps très inquiet pour son fils Petit Pierre qui se rapproche des milieux d’extrème droite sans que lui et son épouse n’aient su réagir à temps, pensant que ça lui passerait. Ils se demandent comment de telles idées ont pu germer en lui. Petit à petit, Degrave comprend que son fils est peut-être bien mouillé dans des affaires bien louches.Nos deux rescapés Sdf vont remonter jusqu’au commanditaire des braquages.

Un roman sombre, politique et réaliste qui explore les milieux néo-nazis sans concession. C’est écrit dans un style fluide, avec un regard très juste sur notre société. Ce qui n’est pas le moindre compliment pour un roman noir : on se fait embarquer et les éléments se mettent en place progressivement pour un final déroutant. Les personnages principaux, comme annexes, sont tous très bien décrits.