Confusion des peines - Julien Blanc Editions Libretto Parution octobre 2013

Confusion des peines – Julien Blanc
Editions Libretto
Parution octobre 2013

Confusion des peines

Seule, la vie…, I

J’ai eu le plaisir de recevoir cette auto-biographie de Julien Blanc grâce à l’opération masse-critique organisée par Babelio  que je remercie sincèrement ainsi que l’éditeur Libretto.

Le mot de l’éditeur : « Que fut mon enfance ? Une suite d’erreurs. Erreurs de la part de ceux qui veulent les enfants comme ils les aiment, au lieu de les aimer comme ils sont. »

Orphelin recueilli par une marraine aussi bigote qu’austère, Julien Blanc sera rapidement envoyé à l’orphelinat puis en maisons de redressement à une époque où ceux qui ne filaient pas droit n’avaient que les coups ou la charité pour avenir. Il y apprendra la faim, l’humiliation et ne deviendra que révolte : une révolte qu’il partage ici sans artifice et qui n’altérera en rien ses rêves.

Mon avis :

De cette époque, je ne connais réellement que la Grande Guerre comme les contemporains l’appelaient. L’histoire de Julien Blanc débute à Paris en 1908, né orphelin de père, sa mère est son univers, son unique amour. Celle-ci se tourne vers les dames d’oeuvres pour survivre. L’une d’entre elle devient sa marraine, et persuade sa mère de le faire baptiser. C’est ainsi que sa maman devint bonne à tout faire. C’est elle qui lui apprit à lire, écrire, calculer et quelques notions de piano.

Aux huit ans de son fils, elle meurt et est enterrée en fosse commune. C’est alors le début de la valse entre les différents établissements pour le jeune enfant sans famille.

Il n’est pas difficile d’imaginer le désarroi du petit garçon qu’évoque Julien Blanc et encore moins de comprendre toute cette révolte montante en ce petit d’homme Là, où il lui fallait amour et tendresse, il n’eut que brimades, fessées, cachots, et humiliations.

Très vite il se dit :

Je commençais néanmoins de comprendre ce jour-là que la société est hypocrite, qu’il faudrait ruser avec elle, la prendre par surprise, à revers. J’étais tout d’une pièce. Quand j’avais quelque chose à dire, je le disais, ouvertement, brutalement, sans m’occuper des conséquences.

Au sortir de la maison de correction, il se lie d’amitié avec Jean, son aîné de 6 mois.

Julien Blanc trouve des mots forts et d’une beauté touchante au souvenir de cette amitié « ce bombardement de photons amicaux dans mes ténèbres. »

Il y eut les premières amours avec la déchirure des séparations et les trahisons.

Ce fut l’orphelinat puis les placements dans des familles. Des renvois parce qu’il vole en catimini. Ballotté d’un coin à un autre, sa marraine ne le suit que de loin, trop occupée par les hautes sphères et c’est Daise qui l’a en charge le plus souvent, Daise encore plus méchante que sa marraine.

A 14 ans il entre au patronage ( dépendant de l’Etat ) pour y apprendre un métier manuel, alors qu’il veut suivre des études pour aller au lycée tenter de rejoindre Jean. Il rêve toujours de devenir musicien.C’est à ce moment qu’il devient Pupille. La suite est dans la continuité, hélas pour lui, de ce qu’il a vécu et va s’aggravant.

Cette première partie des mémoires de Julien Blanc « Confusion de peines » nous révèle beaucoup de choses sur la vie dans les années précédent la Grande Guerre. C’est terrible de lire ce témoignage d’enfant puis de jeune homme, tellement brimé, aux rêves se heurtant à la réalité crue de la religion et de la bourgeoisie. Quelques mains lui seront tendues cependant et il gardera tout de même quelques espoirs dans sa tristesse environnante.

Les conditions dans lesquelles ont faisaient travailler ces jeunes enfants sont terribles et non sans rappeler ce qu’il se passe encore dans certaines régions du globe.

Ici, c’est tu plies ou tu vas au cachot. Sa parole est constamment remise en question, qu’il dise la vérité ou qu’il mente, le résultat face à ces nombreux adultes hypocrites et parfois pédophiles ne varie pas. Tout n’est quasiment toujours que rapport de force. 

Je finis ce retour de lecture par cette citation :

Etre libre ? Mais c’était impossible. Je n’aurais pu l’être qu’à mille lieues de toute civilisation. Ici, ma course à l’embauche me prouva, le jour que je me mis à y réfléchir de près, que je ne serais jamais libre. C’était un mot vide, dénué de sens.La liberté, c’est ce qui n’est pas défendu. Tout m’était interdit.

Je vous invite chaudement à découvrir La confusion des peines.